Le samedi 11 juin 1994 la petite Émilie Tanay, 9 ans, décédait après avoir avalé une cuillerée de sirop de Josacine, médicament qu'elle prenait depuis quelques jours. Elle était pour la journée chez des amis de ses parents, les Tocqueville, à Gruchet -le-Valasse en Seine-Maritime. Le 27 juillet 1994, les gendarmes arrêtèrent Mr Jean-Marc Deperrois, chef d'une entreprise de thermographie, en s'appuyant sur deux faits : il avait eu, quelques mois plus tôt, une liaison passagère avec Madame Tocqueville et il possédait du cyanure pour son entreprise. D'après les enquêteurs, il aurait mis du cyanure dans la Josacine pensant qu'elle était destinée à Mr Tocqueville. On lui reprocha de s'être débarrassé du cyanure dès qu'il eut connaissance du décès par empoisonnement de la petite Émilie. Malgré toutes les demandes de remise en liberté formulées par ses avocats, il fut maintenu en détention "provisoire" pendant ... 3 ans. Le rejet du 20 décembre 1995 précisait dans son dernier attendu : " l'émotion qui subsiste ne pouvant qu'être ravivée par une remise en liberté prématurée de celui que, nonobstant la présomption d'innocence, une partie importante de la presse et de l'opinion publique considèrent depuis sa mise en examen comme le responsable du drame, et qui en tout cas reste à ce jour le seul suspect." Outre l'inconsistance du prétendu mobile, le procès aux Assises, en mai 1997, a fait apparaître les nombreuses failles de l'enquête et de l'instruction, principalement : - absence de prise en compte du témoignage capital du Docteur Vue : médecin d'Emilie Tanay, il avait spontanément fait part aux gendarmes, le 4 juillet 1994, des propos de Madame Tanay tenus deux jours après le décès d'Emilie, concernant l'aspect anormal de la Josacine lors de sa préparation. Cette déclaration démontrerait que le flacon de Josacine aurait été empoisonné avant son arrivée au domicile des Tocqueville. Ce qui innocenterait Jean-Marc Deperrois. - impossibilité pour les experts de mélanger la Josacine avec le cyanure dont disposait J.M.Deperrois sans que celle-ci change de couleur : au lieu d'être jaune la solution devient marron. Cette impossibilité prouverait que le cyanure ayant empoisonné le médicament ne serait pas celui dont disposait Jean-Marc Deperrois . Dans son réquisitoire, l'Avocat Général, reconnaissant lui-même qu'il n'y avait " ni aveu, ni témoin, ni preuve formelle", réclamait pourtant 25 ans de prison.
Il n'y avait l'époque pas d'appel en France pour les procès d'Assises : c'était le seul pays européen à être ainsi en contradiction avec la Convention Européenne des Droits de l'Homme .
Cette affaire, et en particulier le procès, a été rapportée en détail dans la presse écrite. Voir par exemple les articles aux titres significatifs :
LE MONDE
( 27 mai 1997) " La condamnation de J-M Deperrois soulève colère et amertume"
( 4 juillet 1997) " Les soutiens de M. Deperrois plaident pour une réforme rapide de la Cour d'Assises"
LE NOUVEL OBSERVATEUR
(29 mai 1997) " Josacine, l'ombre du doute"
(24 juillet 1997) " Le grand doute de l'affaire Deperrois "
LE POINT
( 2 juin 1997) " Le poison du doute "
L'EVENEMENT DU JEUDI
( 5 juin 1997) " Contre -enquête sur l'affaire de la Josacine empoisonnée : y a-t-il un coupable en liberté ? "
( 11 septembre 1997) " J-M Deperrois : J'attends toujours mon véritable procès ".